Chirurgie: opérations sans cicatrice !

Des pionniers de la chirurgie commencent à opérer sans même ouvrir leurs patients ! Pas la moindre cicatrice, moins de douleurs postopératoires : pour y arriver, les médecins utilisent les orifices naturels pour introduire des instruments miniaturisés.


"Passer sur le billard et se réveiller sans aucune cicatrice ? Ce n'est plus tout à fait de la science-fiction. Des opérations sans scalpel et sans incision : on appelle cela la chirurgie non-invasive. Menée par le Pr Jacques Marescaux, une équipe française de l'Institut de recherche contre les cancers de l'appareil digestifs de Strasbourg (Ircad) a réussi, pour la première fois, l'ablation de la vésicule biliaire d'une patiente sans même lui ouvrir le ventre !

La technique va plus loin que la chirurgie laparoscopique, actuellement très répandue, qui permet de pratiquer des interventions à l'aide de deux à trois petites incisions dans le nombril et le bas-ventre pour y glisser une caméra ainsi que des instruments de travail miniaturisés. La chirurgie non-invasive est, elle aussi, contrôlée à distance grâce à un écran. Mais les instruments permettant de voir, pincer ou sectionner passent par... les orifices naturels ! C'est par la bouche, le vagin ou l'anus que les spécialistes glissent une sorte de longue tige flexible (endoscope), munie elle-même de plusieurs 'outils'. Ils peuvent ainsi réparer et même extraire certains organes ou parties d'organes, qu'ils ressortent par le même chemin.

En Inde, plusieurs extractions d'appendice ont été effectuées via la bouche de patients ces derniers mois.

'Pour la première fois cette année des opérations de ce type ont été pratiquées sur des humains, observe le Pr Nicolas Demartines, chef du service de chirurgie viscérale au CHUV. Une centaine d'interventions ont déjà été réalisées à travers le monde. Les résultats obtenus sont très bons, mais on en est encore au stade expérimental'.

Une des grandes promesses de la chirurgie non-invasive, c'est évidemment l'absence de cicatrices externes pour le patient. Ce qui ne veut pas dire aucune cicatrice du tout. Pour atteindre un organe, une incision interne peut être nécessaire (par exemple dans l'utérus pour rejoindre la vésicule biliaire). Mais la cicatrisation à l'intérieur du corps se fait bien plus facilement que sur la peau. Les partisans de cette méthode mettent aussi en avant d'autres points forts : moins de douleurs postopératoires, un temps d'hospitalisation et des risques de complications réduits, un accès facilité à certaines parties du corps notamment chez des patients obèses. Autant d'avantages qui suscitent un grand enthousiasme dans le monde médical. Même si les organes concernés sont encore limités (vésicule biliaire, appendice, pancréas, glandes surrénales, rein).
'Ce qui se fait est très intéressant', reconnaît le Pr. Demartines, qui a lui même pratiqué une opération de ce genre sur un cochon à deux reprises avec les pionniers de l'Ircad."
Défis techniques
Mais le spécialiste préfère rester prudent.

'Beaucoup de gens ont très peur de rater le départ de cette technique, c'est pour cela que l'écho de ces opérations a été si grand parmi les scientifiques. Mais on ne peut pas encore dire comment cela va se développer, note-t-il. A l'heure actuelle, il reste certaines difficultés techniques à surmonter. Ce long tuyau que l'on introduit doit être flexible pour passer par les orifices naturels, mais une fois à l'intérieur il est préférable, pour accomplir des gestes techniques précis, d'avoir des instruments rigides. Par ailleurs, les différents instruments (caméra, pince, etc.) sont, pour l'instant, solidaires les uns des autres. C'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas être bougés individuellement. Ça va être un défi technologique d'améliorer tout cela. Mais de nombreux prototypes existent déjà et leur commercialisation n'est qu'une question de temps.'

En attendant, plusieurs chirurgiens suisses, tout comme leurs confrères du monde entier, ont déjà commencé à s'entraîner, sur des cadavres ou des animaux."

Source :
http://www.lematin.ch
Article de Geneviève Comby

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