Vers une chirurgie sans incision

La chirurgie transluminale par les voies naturelles permet une intervention sans douleur ni cicatrice.

"Un chirurgien qui se serait assoupi pendant vingt ans aurait bien du mal à reconnaître les plateaux d’intervention les plus modernes. Après la chirurgie laparoscopique au tournant des années 1990, plusieurs innovations chirurgicales sont en passe de transformer les techniques opératoires. Parmi elles, la chirurgie transluminale, véritable opération sans effraction, pourrait bien suivre un essor similaire à celui de la voie laparoscopique, devenue la règle pour les cholécystecomies. Le Pr Jacques Marescaux (Strasbourg), auteur récent de la première cholécystectomie par voie transvaginale, a présenté cette 'chirurgie sans cicatrice' devant l’Académie nationale de médecine et l’Académie des technologies."

"Cette voie, encore moins invasive que la chirurgie laparoscopique, offre des avantages similaires : moindre traumatisme chirurgical grâce à l’absence d’ouverture pariétale, facilité d’accès à certains organes, hospitalisation brève, diminution, voire absence totale de douleur postopératoire, moindre risque de complications secondaires et, bien sûr, absence totale de cicatrice.

Ce sont des gastroentérologues américains et de Hong Kong qui ont lancé en 1998 l’idée d’utiliser les procédés de la chirurgie endoscopique pour opérer des organes en passant par les orifices naturels. En 2004, une première publication décrit la technique de biopsie hépatique transgastrique chez le porc. Il n’en faut pas plus pour que le pôle alsacien 'Innovations thérapeutiques', dirigé par le Pr Marescaux, se lance dans l’entreprise en créant le projet Anubis. Le 2 avril 2007, après 340 interventions chez l’animal, l’équipe strasbourgeoise opère une jeune femme de 30 ans ayant une lithiase vésiculaire, en introduisant un vidéogastroscope et des instruments endoscopiques par voie transvaginale. Seule une aiguille a été placée dans l’abdomen pour l’insufflation de gaz. La patiente est sortie au deuxième jour après l’intervention sans avoir ressenti de douleurs.

C’est 'un changement radical dans la pratique et la philosophie de la chirurgie', commente le Pr Marescaux. Au cours des derniers mois, son équipe a déjà réalisé près d’une vingtaine d’interventions transluminales : huit cholécystectomies par voie transvaginale, trois cholécystectomies par voie transgastrique chez des hommes, et six chirurgies de l’obésité (gastrectomies de Sleeve) par voie transvaginale. Chez la femme, la voie vaginale est préférée à la voie gastrique, quand elle est possible, car elle est plus facile pour l’opérateur. Une grande série indique un risque infectieux très faible (0,001 pour cent) par cette voie.

Dans les semaines qui viennent, l’équipe de Strasbourg s’apprête à pratiquer la première résection transluminale du côlon gauche, à l’aide de deux endoscopes introduits par voie transrectale et transgastrique, sans aucun trocard. Les premières indications seront les sigmoïdites aiguës et les polypes non dégénérés, non résécables par voie endoscopique. 'Mais nous envisageons de réaliser des interventions sur cancer colique dans un second temps, confie le Pr Marescaux, lorsque les données expérimentales seront suffisantes pour garantir la sécurité de cette voie sur le plan carcinologique.'"

Dr Chantal Guéniot

"Panorama du Médecin du 13 mai 2008"

Réalité virtuelle et robots pour la chirurgie de demain

"Grâce au traitement informatique des données tomodensitométriques, il est possible de construire un 'clone digital' du patient, reconstituant les organes, leur enveloppe, la peau, la vascularisation en trois dimensions. À l’aide d’instruments virtuels, le chirurgien peut alors simuler l’intervention pour choisir la meilleure technique chirurgicale. C’est la réalité virtuelle. Le jour de l’intervention, en superposant les images obtenues par réalité virtuelle aux images endoscopiques réelles du patient, on peut voir apparaître en couleur les structures (tumeurs, vaisseaux...), pour faciliter le geste chirurgical. C’est ce que l’on appelle la 'réalité augmentée'. Enfin, la robotique peut faciliter la manipulation des instruments. Des logiciels permettent au robot de faire des gestes très complexes, comme des microsutures, avec une précision très inférieure à 0,5 mm. De nombreuses entreprises cherchent à parvenir à une chirurgie totalement automatisée. Le chirurgien planifierait l’intervention, le robot prenant ensuite le relais. L’utilisation de la robotique n’est cependant pas sans danger, et il faut savoir résister au lobbying des compagnies, observe le Pr Marescaux. 'Dans notre équipe, nous opérons au maximum deux patients par semaine par robotique.' Actuellement, la seule indication reconnue de la robotique est la prostatectomie."

* La chirurgie transluminale est également appelée Notes, pour Natural Orifice
*La robotique permet aujourd’hui de réaliser des gestes opératoires à distance, ce qui permet à certaines équipes de bénéficier de l’aide de chirurgiens plus expérimentés.
*En 2001, une cholécystectomie laparoscopique a été réalisée par télémédecine. La patiente a été opérée à Strasbourg par une équipe chirurgicale située à New York (Nature, 2001).
*Grâce à des câbles transatlantiques, les gestes réalisés par les chirurgiens à New York s’appliquaient en moins de 200 millisecondes à la patiente.


Source :
http://www.hopital.fr

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